Moi, j’ai rencontré Jean-Christophe au deuxième étage d’un internat d’un lycée parisien. Et pas n’importe quel lycée : le lycée Louis-le-Grand. Sachez d’ailleurs pour votre gouverne, qu’un élève de Louis le Grand s’appele un magnoludovicien. Ça jette non ?
Je ne suis pas sûr que c’est appellation convenait tout à fait à Jean-Christophe lors de ses premiers jours parmi nous. On sentait bien qu’il n’était pas né parisien et qu’il était un peu décalé par rapport à d’autres élèves qui avaient déjà fait leur lycée dans l’établissement ou qui venaient d’autres grandes villes de province.
Dans le pire des cas, nous ne le prenions pas tres au sérieux et, dans la meilleure des hypothèses, nous étions un peu inquiets pour lui.
Nous n’étions surtout pas au bout de nos surprises.
Déjà, sa manière de s’exprimer, sa calligraphie remarquable et ses connaissances encyclopédiques auraient dû nous alerter. Car si, comme le pensent beaucoup, une classe préparatoire est un panier de crabes alors celui-là était un gros crabe, un très gros crabe. Au gré des concours blanc et autres colles, nous avons vite compris qu’il n’aurait pas beaucoup de difficulté à réussir les concours car il était déjà hors concours.
Mais, heureusement, la classe préparatoire n’est pas un panier de crabes, en tous cas pas celle là ! Et derrière l’excellent élève, nous avons vite découvert un excellent camarade. Je crois que ce qui le caractérisait le mieux à cette époque, c’est son extraordinaire générosité. Combien de fois ai-je fais appel à son aide durant cette année et les suivantes. Autant de fois, il s’est montré disponible, immédiatement, sans arrière-pensée, sans attentes de contrepartie.
Ta musique, Jean-Christophe, m’a rendu heureux et m’a consolé selon les moments. Ta voiture nous a emmené sur bien des routes françaises et m’a sauvé lorsqu’il n’y avait plus de train pour rentrer à Jouy. Ton amitié m’a fait chaud au cœur dans les moments de tristesse que nul autre n’a partagé.
Cela ne t’empêchait pas aussi d’être un incorrigible farceur. Je me souviens de ce cri qui résonne dans les couloirs du lycée « compact ! » et qui signifie pour celui qui ne comprend pas encore ce qui sepasse qu’il lui sera impossible de regagner sa chambre.
Me croirez-vous si je vous dis que cet esprit farceur et particulièrement créatif est allé jusqu’à déménager entièrement un de ses camarades de promo d’un bout à l’autre du campus d’HEC et intervertir les serrures pour lui faire croire que sa chambre avait été réquisitionnée par le fils d’un ambassadeur africain ? Si vous ne me croyez pas, vous avez tort.
Oui Jean-Christophe, j’ai bien ri avec toi. Avec toi, j’ai aussi fait l’expérience de la bonté. Nous n’étions pas d’accord sur tout, loin de là ! Et je pense que certains de nos différents était irréductibles. Mais j’étais ton ami, je suis ton ami. Parce que c’était toi, parce que c’était moi.